Avec son livre « Passeurs et évadés dans les Pyrénées », Thomas Ferrer décrit la réalité de ceux qui ont franchi la frontière entre la France de plus en plus occupée au cours de la seconde guerre mondiale et l’Espagne de Franco. Quatre ouvrages collectifs ou individuel pour cet agrégé d’histoire-géographique qui travaille à la rencontre de notre territoire et de la grande histoire. Une mise en perspective de l’arrivés de réfugiés espagnols dans les villes et villages des Hautes-Pyrénées il y a deux générations qui sont les témoins locaux de mouvements dont l’ampleur et la portée dépassent les frontières de département.
Nous avons rencontré Thomas Ferrer au lycée Jean Dupuy ou il enseigne pour en savoir davantage sur sa démarche et sur sa perception de l’histoire de notre territoire.
Comment avez-vous commencé à écrire sur ces événements historiques dans les Pyrénées ?
Il faut que je parle d’abord de José Cubero qui m’a passionné pour l’histoire-géographie quand j’étais élève au lycée. C’est grâce a lui que j’ai fait des études d’histoire et que je suis devenu enseignant. Quand je suis revenu sur Tarbes après mes premières années d’enseignement, il m’a proposé de faire une exposition sur les Hautes-Pyrénées pendant la Seconde Guerre mondiale. Quand on a présenté ce travail, le Maire de Tarbes à lancé qu’avec une telle richesse on devait écrire un livre. José Cubero a pris la balle au bond et on s’est lancé avec Marie Fernandez qui travaillait au Musée de la Déportation et de la Résistance dans la rédaction d’un ouvrage collectif sur la défaite, la collaboration, la résistance et la libération en Hautes-Pyrénées.
Le début d’une série de livres !
Après cet ouvrage, j’ai rencontré d’autres personnes qui travaillent dans le domaine de la mémoire comme François Giustiniani des Archives départementales des Hautes-Pyrénées ou Sylvaine Guinle-Lorinet, maitre de conférences de l’Université Pau-Pays de l’Adour avec laquelle j’ai écrit un livre sur la vie des populations tarbaises pendant la guerre de 14-18 avec des travaux sur l’approvisionnement alimentaire, sur le deuil, sur la fabrique d’armes pour le front. J’ai ensuite travaillé seul sur les passeurs et évadés dans les Pyrénées en faisant mes propres recherches aux archives, au musée, en faisant des entretiens.
Qu’avez-vous envie de montrer à la conjonction de notre territoire et de la grande histoire ?
On ne veut pas s’enfermer dans une histoire locale réduite à une chronique d’événements. Mais au contraire montrer que l’histoire se fait partout et que les évènements qui se déroulent en Hautes-Pyrénées, les parcours individuels s’articulent avec une histoire plus générale. Des événements qui se sont déroulés en Hautes-Pyrénées et plus largement dans le sud de la France ont eu un impact sur une histoire nationale et internationale, et inversement. C’est la connexion qui m’intéresse et que je mets en lumière au travers de mes recherches.
Après les Hautes-Pyrénées et les Pyrénées vers quelle échelle allez-vous ?
Je reste à l’articulation entre le local et le global. Dans le livre qui sortira en mars, ce sera à l’échelle des migrations contraintes, l’exil et migrations politiques de 1870 aux années 1980. Les réfugiés espagnols, les Belges qui sont arrivés en Hautes-Pyrénées en 14-18, les Russes et les Arméniens dans les années 20, les Portugais et d’autres ensuite. Des migrations qu’on a vu arriver en Hautes-Pyrénées et dans le sud de la France qui font partie de l’histoire nationale et internationale.
Est-ce que ce travail change votre regard d’enseignant ?
Oui, bien sûr. En travaillant sur le parcours d’individus de ces périodes, on réalise combien les choses ne sont pas aussi simples qu’on a l’habitude de l’expliquer. On voit souvent des parcours qui échappent à la simplicité d’une classification entre résistants et collabos.