Dès l’entrée au Parvis, le public est face à un choix : le récit du père, de la mère ou de l’adolescent. On ne sait pas encore vraiment ce que le spectacle va nous proposer, mais on sait que le casque réglé sur l’un des trois canaux ne va nous faire entendre que les confidences d’un des protagonistes. Tout le monde sera face au même spectacle, mais le public va se partager entre trois points de vue. Une mise en scène qui nous ôte le privilège d’être un spectateur omniscient pour nous inviter dans l'exclusivité de l’intimité d’un regard sur une relation déliquescente entre un adolescent, son père et sa mère. On tente bien de suivre plusieurs récits avant de comprendre qu’on ne pourra n’en comprendre qu’un.
Sur scène le père la mère et l’adolescent qui nous livre ses pensées au creux de l’oreille. Qui nous raconte ce qui le mène à se couper de ce qui l’entoure, de ceux qui l’aiment pour se retirer de la société des hommes. On suit avec empathie sa trajectoire en croisant notre propre vision à sa perception. Comment son père et sa mère qui cherchent à restaurer le lien, à continuer à communiquer lui paraissent ridicule pour l’un et pitoyable pour l’autre. Et comment la spirale l’éloigne inéluctablement vers un enfermement qui n’a pas besoin d’autre murs que ceux qu’on se fabrique, en ne sachant jamais vraiment qui est enfermé. Un hikikomori comme les centaines de milliers d’adolescents et d’adultes japonais – le plus souvent des hommes – qui vivent coupés du monde. Un spectacle un peu frustrant car on sait bien qu’il y a deux autres pensées qui nous échappent, mais terriblement troublant et efficace.