Beaucoup de vos œuvres sont habité d’un visage sortis des limbes. Il nous raconte quoi ?
C’est un dialogue intérieur entre le réel de ces visages et l’abstraction de ce qui les entoure. Ils sont en posture de réflexion. C’est une façon de donner forme à tout ce qui nous habite à l’intérieur, et de faire des liens avec ce qui nous entoure. Avec les fonds abstraits qui représentent une certaine nature, la forêt nourricière, médicinale, spirituelle. On apparait, on disparait, la nature est toujours là. C’est le lieu approprié pour se poser et réfléchir sur notre passage.
De la Guyane aux Hautes-Pyrénées, la relation du visage au fond est la même ?
Ce que j’ai peint en Guyane est très ancré avec la vie là-bas. Les tableaux représentent quelqu’un de précis. En arrivant en métropole, je me suis détaché de ça. J’ai eu envie de quelque chose de plus poétique, de plus mystique. Les regards, les visages ne ressemblent plus vraiment à ce que j’ai vu. Je retravaille le regard jusqu’à ce qu’il y ait une espèce d’espace qui s’installe et que tout à coup dans ce regard je retrouve les états d’âme qui me parlent.
Vous passez du vert de la forêt au gris minéral de la montagne ?
Je pensais vraiment quitter la forêt avec quelques tableaux dont l’un s'appelle « un dernier vert ». Et je pensais vraiment arriver en métropole que je me représentais en gris minéral. Et en arrivant à Bagnères, j’ai découvert la forêt avant la montagne. On est allé dans les Baronnies pour voir la petite Amazonie, et on vraiment retrouvé des ambiances Guyanaises. Le vert est encore présent sur mes tableaux, mais ma palette de couleur glisse sur des teintes plus minérales, plus pastel, sans que je le cherche en fait. Le vert très présent de la forêt guyanaise à un peu disparu de mes tableaux pendant une période. Je n’ai pas envie d’amener la forêt guyanaise ici, mais je ne connais pas encore assez Bagnères et les Pyrénées pour faire un travail autour de ça. Pour l’instant, j’observe, je vois ce qui me nourris. Je suis dans une espèce de sas entre la Guyane et ici.
Vous avez exposé à l’Abbadiale et en Guyane. Est-ce que le regard du public est le même ici et là-bas ?
Je n’exposais pas tout à fait la même chose. En Guyane les gens venaient se retrouver et retrouver la Guyane dans mes tableaux, dans sa diversité, dans ses problématiques. Ici, j’ai exposé d’autres tableaux, plus abstraits. Mais j’ai vu que ça fonctionnait, que ça parlait aux visiteurs.
Vers quoi avez-vous envie d’aller ?
Je continu à suivre le fil du lien entre les gens et ce qui les entoure. J’ai envie de transcrire ce qui ne se voit pas forcément. J’ai vu qu’à Bagnères il y avait la grotte des fées, la vierge du Bédat. Des lieux très spirituels et très mystiques qui me donne envie d’aller voir comment on peut s’inscrire là-dedans. On voit les traces des hommes et des femmes qui se sont approprié le lieu au cours du temps. Il faudrait que je fasse un tour aux archives pour en savoir plus. La forêt avait beaucoup de choses à raconter. Je pense que la montagne à beaucoup de choses à raconter aussi. C’est ça que j’ai envie de traiter dans ma peinture. Mais pour le moment, je ne les connais pas encore assez pour pouvoir raconter ces histoires.
Comment vous installez-vous dans votre vie d’artiste des Hautes-Pyrénées ?
J’ai suivi une formation sur la professionnalisation qui m’a permis de rencontrer d’autres artistes et des acteurs du secteur. J’ai compris que ça manquait cruellement de lieux – associatifs, en tout cas, car il y a quelques lieux institutionnels - pour exposer et créer une vraie dynamique. J’aimerais reprendre une activité à mi-temps en parallèle à la peinture. En Guyane je mettais en place des ateliers de peinture, je travaillais dans l’éducation à l’image aussi. Et dans le cinéma audiovisuel pour un festival. C’est des activités de je voudrais remettre en place ici à mi-temps à côté de peindre. Car il faut du temps pour peindre, pour se faire un réseau, pour chercher des lieux d’expo. Et faire les dossiers et le côté administratif. Être artiste, c’est être entrepreneur.