Alors que les vagues successives de COVID vident les salles de spectacle certains se résignent à un état de culture empêchée. D’autre pas comme Maya Paquereau qui multiplie les projets à défaut de multiplier les représentations quand c’est impossible et en saisissant toutes les occasions d’être sur les planches quand c’est possible. La cigale et le lion, Zone 321 nous ont montré qu’elle cultive un bel univers à la croisée de la liberté, de la musique, de la poésie. Nous avons rencontré Maya Paquereau pour partager avec elle un regard sur ce qu’elle propose que scène.
Comment devient-on comédien et metteur en scène ?
Pour moi le chemin a été long, en commençant à 12 ou 13 ans en classe théâtre avec un professeur de français passionné en partenariat avec le conservatoire de Cholet, bien avant que je n’arrive en Hautes-Pyrénées. On avait un cursus riche et pointu avec des comédiens professionnels qui intervenaient. Les premières pièces que j’ai jouées à ce moment-là m’ont vraiment lancé dans le théâtre. J’ai continué au lycée, fais une fac de lettre option théâtre ensuite. Mais je n’étais pas encore prête à m’affirmer comme comédienne. Je n’étais assez sûre de moi pour faire une école de théâtre après le bac. Et ça a continué de me titiller, j’ai fait beaucoup de formation clown, du masque, le théâtre Antoine Vitez, du Roy Hart qui m’a permis de développer le chant lyrique avec une approche corps et voix. J’ai joué dans des troupes amateures, j’ai écrit des textes, j’ai fait des adaptations, je suis intervenue dans des écoles. Ce n’est qu’à 30 ans que j’ai pris de l’assurance, j’ai réalisé que c’était ça que je voulais faire, que j’avais déjà fait pas mal de choses et j’ai assumé de m’affirmer comme une professionnelle. Ça m’a vraiment libéré et toutes les briques que j’avais posé avant m’ont permis de me construire.
On vous a découvert en Hautes-Pyrénées avec La cigale et le lion
J’avais déjà écrit La cigale à fable. J’ai rencontré Marc Lallement, j’ai montré ce que j’avais écrit, on a travaillé ensemble, il m’a appris beaucoup de choses et ça a donné La cigale et le lion. Une première affirmation de ce que je proposais avec mon identité et mes expériences faite de théâtre, d’improvisation sonore, de clown, de musique, de chant, de voix, de rapport à la poésie pour me construire. J’ai rencontré beaucoup de gens en Hautes-Pyrénées, des petites étoiles qui illuminent nos vies. Marc Lallement. Carlos Moreno avec qui j’ai fait beaucoup de spectacle jeune public et monté la compagnie de la tong. La compagnie des Jolies choses, on a fabriqué Les livreurs de mots, il y a aussi les micro mots au Celtic. Beaucoup d’aventures du coté de Luz avec Valérie Lons, avec Eliane Blin. Une constellation qui m’a permis de me poursuivre ma recherche artistique que je développe avec la Compagnie de la tong.
Pas seulement en tant que comédienne !
Pour moi, il n’y a pas de frontière entre être comédiens, être metteur en scène, être technicien, être auteur. Tout ça se confond pour qu’un projet existe. Surtout dans un département comme le nôtre. La hiérarchie professionnelle existe sur les grosses structures, mais je me considère comme un artisan du spectacle vivant. J’aime la technique, j’aime comprendre comment ça marche du début à la fin et connaitre tout ce qui fait le spectacle. Et petit à petit on précise sa place.
On vous a souvent vu dans du théâtre de rue. C’est un format que vous affectionnez ou ce sont les conditions qui se sont imposées ?
C’est un peu les deux. Le théâtre que j’ai appris à 16 ans est un théâtre magnifique mais il est un peu précieux et loin de la vraie vie. Mon chemin m’a amené à bousculer ce théâtre pour être plus proche du public, en sortant des grandes scènes pour aller à la rencontre de gens qui n’avaient pas prévu d’être spectateur à ce moment-là. On apprend avoir besoin de peu de choses pour embarquer le public.
Bousculer, c’est une habitude ! De La cigale et le lion qui bouscule La Fontaine à Zone 321 qui fait tout exploser !
Je ne cherche pas forcément à bousculer, mais j’ai des choses à dire. Je suis choquée tous les jours par le monde qui m’entoure, les injustices, on est face à des murs. C’est ce qui nourrit mon écriture. Zone 321 est né à la fois d’une mémoire familiale avec mon Papy vélo qui est le personnage principal, et d’une science-fiction qui est une dystopie de la réalité. J’y met toute ma révolte.