"Tchekhov a sous-titré sa pièce scènes de la vie de campagne en 4 actes, alors on le fait à la campagne. Il l'aurait sous titré scènes de la vie en Sibérie, nous aurions été en Sibérie." C'est ainsi que le Théâtre de l'unité justifie que les spectateurs se retrouvent assis sur des bottes de pailles, au grand air - un peu humide - au milieu d'un champs, quelque part entre Lourdes et Bagnères. A Pouts précisément, sur la commune d'Escoubès. "Les comédiens n'ont pas de micros donc vous n'entendrez pas la moitié du texte et comme il n'y a qu'un projecteur d'ici une heure vous ne verrez plus grand chose", une véritable gageure ! Pour aller encore plus loin, Oncle Vania qui a 47 ans dans la pièce est joué par Panxo Jimenez qui n'en n'a que la moitié, le rôle de Marina, La nounou est tenu par Marcel Djondo, solide comédien togolais. Un esprit de théâtre de rue auxquels sont attachés Hervée de Lafond et Jacques Livchine, metteurs en scène et figures de proue de cette troupe.
Partons donc pour cet Oncle Vania qui fait voler en éclats tous les repères auxquels sont habitués les spectateurs : les comédiens qui jouent sur un espace à perte de vue, le chien, les vaches et les chevaux, la brume et les Pyrénées comme décor naturel. Quelle entrée en scène que celle d'un comédien qu'on voit courir et crier au loin et arriver à bout de souffle ! Le ton de la pièce en est changé : le caractère dramatique d'Oncle Vania laisse la place à une comédie sur fond de drame. On finit bien par se tirer dessus, mais c'est dans un grand mouvement de folie qui parait presque normal. C'est peut-être précisément là que Tchekhov voulait nous amener.
Stéphane Boularand