On arrive en ayant encore en mémoire l’Oncle Vania à la campagne du Théâtre de l’Unité, que le Parvis nous avait proposé lors de la saison précédente. Il y avait le bus pour nous emmener à Pouts, entre Lourdes et Bagnères, les spectateurs installés en plein air sur des bottes de pailles face aux Pyrénées et une mise en scène qui ouvrait sur un immense espace de jeu. Quand on découvre « Espia a una mujer que se mata », le contraste est saisissant : Sept comédiens qui se marchent les uns sur les autres, qui se parlent les uns sur les autres. Décidément le metteur en scène argentin Daniel Veronese a pris un parti radicalement différent.
Un décor et des costumes quelconques, des couleurs fades, le flux tumultueux des dialogues en espagnol. On est loin de l’ambiance de décadence russe de Tchekhov. En mêlant au texte original des morceaux des Bonnes de Jean Genet et une distanciation toute Brechtienne, Daniel Veronese frise le chaos. Mais c’est précisément comme ça que cette adaptation trouve une certaine efficacité. Crise Argentine des années 2000 ou chute de l’empire Russe renvoient à un même marasme. Oncle Vania et Espia a una mujer que se mata, littéralement « Espionne une femme qui se tue », se rejoignent pour anéantir toutes les illusions.
Stéphane Boularand