De Tchekhov, on connait bien la critique sociale, la vision acide sur une aristocratie russe décadente quelques années avant la révolution de 1917 qui va les balayer. La Cerisaie en est une belle illustration avec cette grande famille russe qui se perd dans ses états d’âmes au moment où la propriété qui les a vus grandir est sur le point d’être vendue aux enchères. Mais est moins habitué à l’humour de Tchekhov. Et pourtant en commençant l’écriture de La Cerisaie, il annonçait « La prochaine pièce que j’écrirai sera sûrement drôle, très drôle, du moins dans l’approche ». Une approche pas forcément perceptible dans des mises en scène comme celle d’Alain Françon au Théâtre de la Colline il y a quelques années, plus proche de l’esprit de Constantin Stanislavski qui a fait la mise en scène en 1904, lors de la création, envoyant La cerisaie comme une tragédie.
La mise en scène du collectif flamand Tg Stan prend son contre-pied en rendant à cette pièce les attributs de la comédie que Tchekhov lui avait donné. Et c’est un puissant vent de folie et de liberté qui va souffler pendant plus de deux heures sur cette Cerisaie présentée mardi soir sur la scène du Parvis. Un regard décapant sur le texte, comme savent si bien le faire les compagnies flamandes de Tg Stan à la compagnie Marius qui a présenté le mois dernier son Figaro. Une approche pleine d’humour, pas toujours tendre, et de dérision. C’est sans doute de la griotte au gout délicieusement acidulé que produit cette Cerisaie. Un superbe moment de théâtre qui donne corps à la comédie voulue par Tchekhov.